À la seconde où mon conjoint et moi avons posé le pied dans le vieux chalet qui allait nous tenir lieu de maison, nous avons su que nous y étions, que cette maison scellerait définitivement nos recherches. Ça faisait deux ans et demi que nous magasinions une demeure pour notre famille à venir; j’ai même accouché avant que notre projet ne le fasse. Ambre, du haut de ses trois mois et de ses deux joues rebondies, était avec nous, perchée à mon sein, lors de cette rencontre historique.
Pourtant, mon conjoint me harcelait (le terme est juste) depuis des semaines pour que je visite cette maison. Je restais de marbre devant, je me cite, cette « vieille bicoque hideuse » ou ce « taudis merdique », selon mon humeur. Il a fini par imprimer la fiche de la demeure, me disant: « je te montre cette maison pour la dernière fois, c’est promis, mais, de grâce, prends le temps de la regarder objectivement ». Il m’aura suffit de mettre mes lunettes roses et de sortir un crayon de manière à esquisser quelques travaux à même les photos pour me convaincre. J’ai passé de la plus froide indifférence à l’envie irrépressible de visiter les lieux.
J’ai tout de suite aimé les volumes, essentiellement en raison du plafond cathédrale qui trône au-dessus du salon, le coeur de la maison, où débouche la quasi-totalité des pièces. Il n’en demeure pas moins que c’était infiniment laid, comme les photos n’avaient pas manqué de me le laisser savoir. Les mots n’existent pas, littéralement, pour décrire la salle de bain. En revanche, les mots: stuc, luminaire de table de billard (sans la table), fausses briques, poutres prétendument décoratives en bois orangé et lambris assorti me permettent de dire que ce vieux chalet avait trop longtemps été dépourvu de propriétaires de bon goût.
J’ai vu là, au même titre que Monsieur MonAmoureux, l’affaire du siècle. Non seulement notre budget nous autorisait cette acquisition, mais il nous permettait également de bénéficier d’une marge de manoeuvre pour la rendre à notre image, d’autant que c’était un bi-familial doté d’un six et demi au sous-sol. À cette époque, nous ne voyions que le positif, le tout renforcé par un inspecteur en bâtiment qui devrait sérieusement songer à se recycler. Toujours est-il que nous sommes sautés à pieds joints dans ce qui allait être l’aventure d’une vie, avec le lot d’épreuves que ça implique et qui, à certains moments, a failli avoir raison de nos santés mentale et financière, de notre foi en l’humanité et de notre couple.
Je choisis de ne pas ressasser tout ça outre mesure, certes pour éviter de replonger dans l’horreur, mais surtout parce que nous avons accompli tellement depuis que notre maison se résume désormais à bien plus qu’aux pépins qu’on y a traversés. Je vous offre donc une visite guidée de la bête, pièce par pièce, dans un format avant-après (quand mon registre photo le permet).
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